Jean-Vincent Placé visé par une enquête pour «harcèlement sexuel»


Contacté, Jean-Vincent Placé « prend acte » de la plainte.
« Je ne souhaite pas à ce stade faire un quelconque commentaire. Je répondrai, bien entendu, à toutes les questions qui viendraient à m’être posées par les enquêteurs », a ajouté l’ex-patron des sénateurs écologistes en réponse à l’AFP et Mediapart.
En mars dernier, il a été condamné à une amende pour harcèlement sexuel sur une gendarme chargée de sa sécurité.
En septembre 2018, il avait été condamné à trois mois de prison avec sursis et 1.000 euros d’amende pour violences et outrages lors d’une soirée où il avait reconnu avoir été « extrêmement insistant » et « déplacé » avec une cliente.
Un troisième épisode avait déjà été évoqué par un tweet fin 2017 d’Audrey et par un article de Libération de 2018.
Au siège de l’ambassade de France à Rome, le 14 juillet 2016, le secrétaire d’Etat aurait « ordonné » à sa collaboratrice « de danser un slow » avec le sénateur centriste François Zocchetto.
Fin 2018, le visage flouté, Audrey avait accusé ce dernier sur France 3 de l’avoir « pressée » et d’avoir placé sa « main bas dans le dos ».
« Déterminée »
M. Zocchetto avait présenté ses « excuses » pour n’avoir « pas osé résister à l’injonction » de M. Placé mais exclu « tout comportement répréhensible ». L’AFP n’a pu le joindre.
« Les mouvements de libération de la parole et les injonctions amicales des femmes ont déterminé » Audrey, aujourd’hui âgée de 35 ans, « à parler », selon son avocat, Me Tewfik Bouzenoune.
Car dès 2012 et sa « première semaine » avec M. Placé, selon la plainte, il aurait ainsi « exigé » d’elle « port de la robe et escarpins ».
Elle accuse ensuite M. Placé de lui avoir « touché les fesses » dans une discothèque à Lille, en marge du rassemblement estival du parti en août 2015.
Mi-mai 2016, à Séoul, elle assure aussi que celui qui était alors secrétaire d’Etat lui a « touché délibérément la poitrine » dans une voiture dans laquelle se trouvait l’ambassadeur de France en Corée du Sud, Fabien Penone, qui a renvoyé l’AFP vers le Quai d’Orsay.
Audrey assure dans sa plainte que M. Placé lui aurait aussi mis une « main sur la cuisse » en octobre 2014, lors d’un dîner parisien avec des élus, ou une « main dans le bas du dos » en février 2016.
L’AFP n’a pas trouvé de témoin direct confirmant ces épisodes.
Mais trois autres ex-collaboratrices d’élus ont raconté à l’AFP et Mediapart avoir également subi des gestes déplacés de l’ex-secrétaire d’Etat : la première, Julie*, « à l’arrière d’un taxi en 2011 » ; la seconde, Margaux*, « dans un restaurant en 2015 » et au secrétariat d’Etat un an plus tard ; la troisième, Eléonore*, dans la même discothèque de Lille en août 2015.
« Flou artistique »
Deux autres anciennes collaboratrices disent, elles, n’avoir ni subi ni noté de remarques ou de gestes déplacés de l’ex-figure écolo.
La première dit cependant avoir été « constamment en alerte » pour éviter « le flou artistique », « menaçant » : « toute la charge mentale de protéger l’intégrité d’une relation de travail incombe aux jeunes femmes dans ce milieu-là ».
La seconde évoque aussi des scènes de « drague un peu lourde » de M. Placé.
Selon la plainte d’Audrey, les agissements de M. Placé à son égard ont été signalés à Matignon et à l’Elysée.
Au cabinet de François Hollande, son ex-conseiller Frédéric Monteil « n’a pas mémoire d’avoir reçu à ce moment des éléments concernant la plaignante. » Mais il a « eu écho de comportements (de M. Placé) qui interrogeaient ».
Un membre du cabinet de Bernard Cazeneuve a indiqué que le Premier ministre et son équipe avaient bien été informés de la « souffrance » d’Audrey, une collaboratrice « impeccable » qui a donc été recrutée à Matignon début 2017. Bernard Cazeneuve a confirmé à Mediapart et à l’AFP.
A partir de l’épisode de Rome, en juillet 2016, Audrey s’est confiée à des amis : « je l’ai vue à son retour d’Italie », « humiliée », raconte l’un d’eux. Un « moment de prise de conscience de tout ce qu’elle subissait depuis cinq ans », confirme une autre. Je l’avais vue « dépérir physiquement », abonde une troisième.
Plusieurs témoignages incriminent une addiction à l’alcool de M. Placé, qu’il a reconnue en 2018.
Plus largement, au moins quatre femmes attestent du « comportement déplacé » ou du « climat d’ambiguïté » entretenu au travail par l’ex-sénateur. Ce climat dans les milieux écologistes avait aussi été mis en cause lors des accusations visant l’ex-député Denis Baupin.