Chaos à Washington: «Le Capitole est de nouveau sécurisé», la femme touchée par balle est décédée



Lors d’une allocution au ton grave, le prochain président démocrate a dénoncé une attaque « sans précédent » contre la démocratie américaine (voir plus bas). Il a appelé Donald Trump à s’exprimer « immédiatement » à la télévision pour réclamer « la fin du siège » du Capitole et dénoncer cette « insurrection ».
Dans une série de tweets, Donald Trump a demandé à ses partisans de se tenir à l’écart de la violence, avant de leur demander finalement, dans une courte vidéo, de « rentrer chez eux ».
Des militaires de la Garde nationale ont été envoyés à Washington où la maire, Muriel Bowser, a imposé un couvre-feu à partir de 18H00 locales (23H00 GMT).
« Nous reprenons la Chambre », « c’est notre parlement », a déclaré à l’AFP un manifestant anonyme, dans des scènes de chaos qui semblaient inimaginables au sein de la première puissance mondiale.
« Scènes honteuses »
Ces images ont suscité l’indignation à travers le monde. Berlin a appelé les pro-Trump à « cesser de piétiner la démocratie ». Londres dénonce des « scènes honteuses ». Le chef de l’Otan Jens Stoltenberg a dénoncé mercredi des « scènes choquantes », martelant que le résultat de cette élection démocratique devait être « respecté ».
Peu après la fin d’un discours particulièrement virulent de Donald Trump dénonçant des élections « truquées » et promettant de ne jamais concéder sa défaite, certains de ses sympathisants ont pénétré dans le célèbre bâtiment abritant le Sénat et la Chambre des représentants.
Les manifestants ont fait irruption lors des débats de la Chambre, ont investi les terrasses du capitole et provoqué l’évacuation des bâtiments du Congrès, peu après que le vice-président Mike Pence eut annoncé qu’il ne pourrait pas s’opposer à la certification de la victoire de Joe Biden.
Une femme blessée par balle, des policiers blessés dans les heurts
La police a fait usage de gaz lacrymogènes pour tenter d’évacuer les manifestants pro-Trump qui ont envahi la scène installée pour la prestation de serment de Joe Biden le 20 janvier.
Une femme, qui a été touchée par balle à l’intérieur du Capitole, a perdu la vie. Le chef de la police de Washington, Robert Contee, a déclaré lors d’une conférence de presse qu’une enquête avait été ouverte, sans livrer aucune information sur les circonstances du drame. Il n’est pas encore établi qui est l’auteur du tir mortel. Cinq autres personnes ont aussi été transportées à l’hôpital selon les médias. L’un des blessés est un homme tombé d’un échafaudage sur l’aile ouest du Capitole, précise encore CNN.
La police anti-émeute a commencé à évacuer les manifestants en fin d’après-midi (23 heures en Belgique). Sur des images diffusées sur CNN, on peut voir des agents décrocher les drapeaux accrochés par les partisans du président à l’intérieur et sur les façades du bâtiment.
Plusieurs agents ont été blessés dans les heurts entre partisans du président et forces de l’ordre.
Alors que le contrôle de la situation a été repris au Congrès américain, la police annonce avoir arrêté 13 personnes durant les émeutes. Au moins cinq armes à feu ont aussi été saisies. « Le Capitole américain est de nouveau sécurisé, a annoncé un responsable.
Des voix s’élèvent pour dénoncer l’attitude de Trump
De très nombreuses voix se sont élevées à Washington pour dénoncer l’attitude du président américain, accusé d’avoir soufflé sur les braises en refusant de reconnaître sa défaite et en relayant pendant des semaines des théories du complot sur de supposées fraudes électorales.
« Le président incite au terrorisme intérieur », a déploré sur Twitter l’élu démocrate du Wisconsin Mark Pocan, évoquant « un triste jour pour l’Amérique ».
Dans une lettre publiée quelques minutes avant l’ouverture de la session du Parlement américain, Mike Pence avait expliqué que les « contraintes » de la Constitution ne lui permettaient pas de modifier les résultats du scrutin du 3 novembre, tels que transmis par les Etats.
Le vice-président répondait ainsi directement à Donald Trump, dont il a été le fidèle lieutenant pendant les quatre dernières années.
Dans un geste extraordinaire qui restera probablement dans les livres d’histoire, le milliardaire républicain avait choisi de défier le Congrès en réunissant des dizaines de milliers de ses supporteurs à Washington.
« Si Mike Pence fait la bonne chose, nous gagnons l’élection », avait-il lancé. « S’il ne le fait pas, ce sera une triste journée pour notre pays », a-t-il ajouté, laissant entendre qu’il doutait de l’attitude de son numéro deux.
Une session pour officialiser le vote de 306 grands électeurs en faveur de Biden
Avant que les débats ne sombrent dans la confusion, Mike Pence avait bien commencé à présider la session conjointe de la Chambre des représentants et du Sénat qui doit officialiser le vote de 306 grands électeurs en faveur de Joe Biden contre 232 pour Donald Trump.
Selon la Constitution, son rôle consiste à « ouvrir » les certificats envoyés par chacun des 50 Etats pour transmettre les votes de leurs grands électeurs. Seuls les élus peuvent contester les résultats dans certains Etats.
Dès le début de la session, des républicains ont émis des objections aux résultats de l’élection dans l’Etat d’Arizona. Les deux chambres se sont alors séparées pour en débattre.
De plus en plus isolé, le président Donald Trump s’en est pris avec virulence mercredi à son propre camp républicain juste avant que le Congrès n’entérine la victoire de Joe Biden.
Les ténors républicains sont « faibles » et « pathétiques », a-t-il lancé sous un ciel chargé de lourds nuages, à des dizaines de milliers de partisans
« Nous n’abandonnerons jamais. Nous ne concéderons jamais » la défaite, a-t-il martelé.
Mais son obstination à contester l’élection de Joe Biden divise le parti républicain.
« Spirale mortelle »
« Si cette élection était invalidée sur la base de simples allégations des perdants, notre démocratie entrerait dans une spirale mortelle », lui a rétorqué Mitch McConnell, le chef des républicains au Sénat.
Le chef des démocrates Chuck Schumer de son côté a estimé que les républicains soutenant Donald Trump s’associaient à « une tentative de coup d’Etat ».
Ces violents incidents sont intervenus au lendemain d’élections partielles en Géorgie qui ont donné l’avantage aux démocrates désormais bien placés pour prendre le contrôle du Sénat.
Le candidat démocrate Raphael Warnock a battu la sénatrice républicaine Kelly Loeffler et est entré dans l’histoire en devenant le premier sénateur noir élu dans cet Etat du Sud traditionnellement conservateur.
Et les démocrates ont remporté la deuxième sénatoriale cruciale en Géorgie, selon les projections des médias annoncées mercredi après-midi, un terrible revers pour le Grand Old Party.
En effet les républicains, après avoir perdu la Maison Blanche, voyaient ainsi la prestigieuse chambre haute leur échapper.
Plus tard dans la soirée, Donald Trump a commenté le chaos de Washington sur Twitter : « Ce sont les choses et les événements qui arrivent quand une victoire électorale écrasante est enlevée aux grands patriotes qui ont été mal et injustement traités pendant si longtemps. Rentrez chez vous avec amour et paix. Souvenez-vous de ce jour pour toujours ! »
Facebook retire la video de Trump s’adressant à ses partisans
Facebook a retiré une vidéo du président sortant Donald Trump qui appelait ses partisans en train de prendre d’assaut le Capitole à « rentrer chez eux » mais où il déclarait aussi que l’élection avait été « volée ».
« C’est une situation d’urgence et nous prenons des mesures d’urgence appropriées, y compris le retrait de la vidéo du président Trump (…) qui, au final, contribue au risque de violence au lieu de le diminuer », a expliqué Guy Rosen un des vice-présidents du groupe, en charge de l’intégrité de la plateforme.
YouTube a aussi retiré cette vidéo selon le site spécialisé The Verge.