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Procès des attentats à Bruxelles: Bilal El Makhoukhi, de combattant en Syrie à complice des terroristes du 22 mars

Comme à leur habitude, les accusés Osama Krayem, Mohamed Abrini et Salah Abdeslam ont rejoint le cellulaire et n’ont pas assisté à l’audience de jeudi.

Durant toute la journée de jeudi, un enquêteur de la section anti-terroriste de la police judiciaire fédérale (DR3) est revenu devant la cour d’assises sur la vie de l’accusé Bilal El Makhoukhi et sur son rôle dans les attentats commis à Bruxelles le 22 mars 2016. L’homme, qui était bien connu des services de police pour radicalisme avant ces faits, est notamment passé par la Syrie. Avant les attaques, il apportera, selon l’enquête, une aide logistique aux terroristes. Après celles-ci, il récupèrera et déplacera les armes de la cellule.

Revenant dans un premier temps sur la journée de mercredi et le portrait de Mohamed Abrini, la présidente de la cour d’assises, Laurence Massart, s’est étonnée que des notes déclassifiées en 2016, qui concernaient des discussions en prison entre El Makhoukhi et Abrini d’une part et entre Abrini et Mehdi Nemmouche, responsable de l’attentat du Musée Juif de l’autre, n’aient été jointes au dossier que trois ans plus tard, en 2019. Le parquet fédéral a justifié ce hiatus par la volonté de ne pas mettre à mal les enquêtes de renseignements de la Sûreté de l’Etat. Les avocats de la défense ont eux déploré que ces notes aient été envoyées non pas aux juges d’instruction mais au parquet fédéral, qui pouvait alors choisir de les joindre ou non au dossier. Une procédure toutefois prévue par la loi, glisse-t-on du côté des procureurs fédéraux.

Déjà connu des services

Une fois cet incident clos, l’enquêteur de la DR3 a pu présenter l’accusé Bilal El Makhoukhi. Ce trentenaire belgo-marocain était déjà bien connu des services de police avant les attentats commis à Bruxelles. Il connaissait par ailleurs Hervé Bayingana Muhirwa depuis l’enfance et Najim Laachraoui.

Il a notamment fréquenté, avant de partir en Syrie fin 2012, l’association de Jean-Louis Denis, «Aidons les pauvres», étroitement liée à Sharia4Belgium, de Fouad Belkacem.

Après avoir distribué nourriture et flyers de propagande pour cette association et participé à plusieurs manifestations pro-musulmanes, notamment l’une en présence de Najim Laachraoui, il a lui-même pris la route de la Syrie en octobre 2012.

Passé par la Turquie, il y est ensuite resté 14 mois, au sein du groupe Majlis al shura mujahidin. Ce groupe salafiste est passé du giron d’Al-Qaida à celui de l’Etat islamique au cours de son séjour.

C’est pendant cette période qu’il fait plus ample connaissance avec le futur kamikaze Najim Laachraoui et c’est là-bas, lors d’un combat, qu’il est blessé par balles aux deux jambes aux alentours de septembre/octobre 2013. Ces blessures l’obligent à reprendre le chemin de la Belgique, après avoir été opéré en Turquie.

Direction prison

A son retour au pays, début décembre 2013, il est immédiatement arrêté et écroué à la prison de Bruges puis libéré sous conditions, pour raisons médicales, fin février 2014. Cette année-là, il sera amputé d’une partie de la jambe droite.

Selon l’enquête, malgré son retour en Belgique, il reste foncièrement attaché à l’idéologie salafiste djihadiste. Il finit par être condamné à cinq ans de prison, avec sursis partiel, dans le procès de Sharia4Belgium. Après deux mois de détention à la prison de Forest, il est libéré sous bracelet électronique. Celui-ci lui est retiré le 15 mars 2016, une semaine avant les attentats à Bruxelles.

Le lendemain, il apparait sur des images de l’avenue des Casernes en présence de Khalid El Bakraoui, kamikaze du métro.

Les enquêteurs et juges d’instruction se sont ensuite épanchés sur les liens entre Bilal El Makhoukhi et Hervé Bayingana Muhirwa, qui a, selon eux, été recruté dans la cellule par le premier. Des messages audio adressés par Najim Laachraoui à «Abou Ahmed», c’est-à-dire Oussama Atar, alors en Syrie, mentionnent ainsi le recrutement récent d’un nouveau membre dans la cellule par l’entremise d’Abou Imrane, le nom de guerre de Bilal El Makhoukhi.

Pour les enquêteurs, l’accusé s’est impliqué dans la cellule pour recruter de nouveaux membres et a joué un rôle logistique, qu’il devait poursuivre au lendemain du 22 mars, en gérant l’argent dont disposait la cellule et en récupérant, donc, les armes.

Se livre petit à petit

Des affirmations qui se vérifieront au gré des sept auditions et interrogatoires de Bilal El Makhoukhi. Si l’intéressé a commencé par nier toute implication et contact avec les auteurs des attentats, il a en effet progressivement livré des informations aux juges à mesure qu’il était confronté à de nouveaux éléments de l’enquête.

Le 29 juin dernier, lors de sa septième et dernière audition, il avouera finalement avoir déplacé les armes et confirmera une série de doutes des enquêteurs: il est bien Abou Imrane, il s’est bien rendu à l’appartement de la rue Max Roos la veille des attentats, il a bien déplacé les armes - dont il a appris l’existence le 16 mars - après les attentats, a reçu de l’aide pour ce faire, mais refuse de donner les noms de ses complices, ainsi que le lieu où se trouvent les armes. Il maintient que Hervé Bayingana Muhirwa ne l’a jamais aidé de quelque façon que ce soit.

Il précise que Najim Laachraoui et Khalid El Bakraoui lui avaient déjà demandé de l’aide, comme trouver des planques, des voitures, etc. dès le début de l’année 2016. Il leur aurait alors confirmé vouloir les aider, mais dit ne pas pouvoir fournir d’aide tant qu’il était sous bracelet électronique.

Si Bilal El Makhoukhi affirme qu’Hervé Bayingana Muhirwa ne l’a jamais aidé, l’enquête de téléphonie ne dit pas tout à fait la même chose. Les deux hommes entrent ainsi en contact durant plusieurs jours via des numéros de GSM alternatifs et non plus par leurs numéros habituels. Entre le 5 septembre 2015 et le 7 avril 2016, veille de leur arrestation respective, les deux accusés avaient eu 229 contacts via leurs numéros principaux. Subitement, à partir du 22 mars, il n’y en a cependant plus eu aucun, et ce jusqu’au 31 mars.

A noter, enfin, que la présentation de l’accusé Ibrahim Farisi, qui était également prévue ce jeudi, a été reportée à la semaine prochaine (mardi ou mercredi) étant donné l’heure tardive, peu avant 19h00, de la fin de l’audience du jour.

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