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Jackie Chan, l’agent double

Coincé entre sa loyauté à sa mère patrie communiste et son amour pour sa terre d’adoption hollywoodienne, l’acteur hongkongais se révèle plus trouble qu’il n’y paraît.

Du kung-fu acrobatique, de l’humour enfantin et des cascades explosives. Depuis plus de quarante ans et sa première tentative de percer à Hollywood, la recette du succès de Jackie Chan semble immuable et l’homme à l’éternel sourire paraît sans mystère. Pourtant, comme le présente «Jackie Chan: Humour, gloire et kung-fu», documentaire d’Antoine Coursat, la star hongkongaise n’est pas aussi lisse qu’on pourrait le croire.

Bien sûr, dans sa première partie, le portrait qui nous est proposé revient sur la légende Jackie Chan. On voit le petit garçon issu d’une famille chinoise exilée à Hong Kong, alors sous souveraineté britannique, pour fuir le communisme. On suit son calvaire – qu’il racontera dans son biopic «Painted Faces», en 1988–, quand ses parents partent pour l’Australie et l’abandonnent à l’Ecole de l’Opéra de Pékin, où il est soumis à un entraînement qui confine à la torture: quinze heures d’exercices imposés par jour, avec une discipline de fer. On le voit saisir son destin quand une équipe de cinéma vient chercher quelques bambins pour un tournage. Il constate alors que les enfants qui jouent dans un film, non seulement ne sont pas maltraités, mais, en plus, sont nourris! C’est une révélation, et Jackie Chan n’a plus de cesse que de faire carrière au cinéma. Comme cascadeur d’abord, dès 17ans, où il fait ses classes tout en profitant de son douloureux apprentissage à l’Opéra de Pékin pour s’imposer. Puis comme successeur du défunt Bruce Lee, la première star du film de kung-fu.

Double jackpot

Après un faux départ dans un film «à la manière de Bruce Lee», premier degré et sans humour, qui fera un four, on voit Jackie Chan réussir à imposer un personnage plus proche de lui, gaffeur, rieur et généreux, qui crée la «comédie de kung-fu». Le succès de films comme «Drunken Master» est tel qu’au début des années 80, il peut tenter une percée à Hollywood – où il découvre seulement le cinéma de Buster Keaton, Harold Lloyd et Charlie Chaplin, devenus ses idoles! Ce premier essai est infructueux, mais, on le sait, Jackie Chan fera un come-back triomphal dix ans plus tard avec le premier volet de sa saga «Rush Hour», où il formera un tandem drôle et efficace avec Chris Tucker. Depuis, il est une valeur sûre du cinéma asiatique comme américain – le double jackpot.

Et la démocratie?

Un parcours sans ombre. Pourtant, dans sa seconde partie, le documentaire d’Antoine Coursat lève un peu le voile sur la part cachée de Jackie Chan, particulièrement ses relations avec son pays d’origine, la République populaire de Chine, qu’il n’a jamais désavoué. Pire, après la rétrocession de Hong Kong à la Chine en 1997, la star a marqué son soutien à la politique du régime sur l’île rebelle, et condamné la lutte pour la démocratie de ses citoyens. Son zèle lui a permis, lui qui est aussi une star de la chanson en Asie, d’interpréter l’hymne officiel des J.O. de Pékin, en 2008.

Mais cette loyauté envers le pouvoir chinois le place dans une position inconfortable vis-à-vis du pays de l’Oncle Sam. A bientôt 69ans, l’«homme aux mille fractures» tente toujours d’exécuter sa cascade la plus compliquée: plaire à la fois au public impérialiste américain et aux camarades communistes chinois.

«Jackie Chan : Humour, gloire et kung-fu », 20h35, la Trois

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